Succession en Espagne : des droits de succession sont-ils dus en France ?
Introduction
La question de la fiscalité des successions se pose souvent pour des personnes ayant des biens en Espagne ou y résidant et des héritiers résidant en France, ou inversement. En raison des différences de législation fiscale entre les deux pays, une bonne compréhension des règles applicables est essentielle. La convention fiscale franco-espagnole, signée pour éviter la double imposition en matière de droits de succession, joue un rôle clé dans la détermination des obligations fiscales des héritiers.
Les règles internationales d’imposition et les conventions fiscales internationales sont complexes. Les présents développements ne visant pas à l’exhaustivité mais à la synthèse et à la clarté, les informations communiquées peuvent parfois être incomplètes et/ou généralisées. Le conseil de votre notaire sur votre situation particulière est à ce titre impératif.
Régime des droits de succession en France et en Espagne
En France, les droits de succession sont calculés sur la base de l’ensemble des biens transmis, que ceux-ci soient situés en France ou à l’étranger, si le défunt est domicilié en France. Si le défunt est domicilié à l’étranger, seuls les biens situés en France sont taxables, sauf si les héritiers sont eux-mêmes domiciliés en France pendant au moins six des dix années précédant le décès.
En Espagne, la fiscalité successorale est régie à la fois au niveau national et au niveau des communautés autonomes. Chaque région dispose de ses propres règles en matière de taux d’imposition, d’abattements et de réductions fiscales. En général, les taux d’imposition varient de 7,65 % à 34 %, et les abattements dépendent du lien de parenté avec le défunt, de la résidence du bénéficiaire et des particularités régionales. Ces éléments d’informations vous sont communiqués sous toutes réserves. Ceux-ci doivent être confirmés par un juriste fiscaliste espagnol avant toutes démarches.
La convention fiscale entre la France et l’Espagne
La France et l’Espagne ont signé une convention fiscale en matière de succession pour éviter la double imposition. Cette convention, basée sur les principes de l’OCDE, établit des règles spécifiques pour déterminer quel pays a le droit de taxer les biens de la succession.
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Champ d’application de la convention
La convention franco-espagnole s’applique aux successions des personnes domiciliées dans l’un des deux pays au moment de leur décès. Les biens visés incluent les biens immobiliers et mobiliers, ainsi que les droits et créances.
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Répartition du droit d’imposer
Les biens immobiliers sont imposés dans le pays où ils sont situés. Par exemple, un bien immobilier situé en Espagne sera soumis aux droits de succession espagnols, même si le défunt est domicilié en France. De même, un bien immobilier situé en France sera imposé en France.
Pour les biens mobiliers (comptes bancaires, titres de société,…), le droit d’imposer est généralement attribué au pays de résidence du défunt bien que des exceptions existent comme par exemple concernant les meubles corporels (imposables par l’Etat où ils sont situés) ou les véhicules (imposables par l’Etat dans lequel ils sont immatriculés).
NB : il est constaté une notable différence d’interprétation de la convention fiscale par les administrations fiscales françaises et espagnoles concernant spécifiquement les comptes bancaires. L’administration française considère que ceux-ci doivent être imposés par l’Etat du domicile du défunt et l’administration espagnole considère que ceux-ci sont imposables par l’Etat dans lequel ces comptes sont ouverts. Cette contradiction peut aboutir à une situation double imposition laquelle doit être résolue par procédure amiable entre Etats.
Élimination de la double imposition
La convention prévoit que les cas de double imposition sont évités par application de la méthode de l’exonération mais avec application de la règle du taux effectif.
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La méthode de l’exonération
En vertu de la convention fiscale franco-espagnole, chaque Etat n’a le droit d’imposé que les biens de la succession qui lui sont attribués même si le défunt y résidait. Ainsi, si un bien immobilier du défunt est stipulé imposable par l’Espagne, la France ne pourra imposer ce bien. Cette méthode s’oppose à la « méthode de l’imputation » rendue applicable par certaines autres conventions fiscales conclues par la France.
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Règle du taux effectif
Si les biens imposables par un Etat ne peuvent l’être par l’autre en vertu de la convention, chaque Etat fixe le taux d’imposition applicable en vertu de sa propre législation. Il en résulte dans certains cas que ce taux est alors calculé en prenant en compte des biens qui ne peuvent pourtant pas être imposé par un Etat en vertu de la convention.
Compte-tenu du barème progressif des droits de succession applicable en France, la règle du taux effectif est de nature à augmenter substantiellement l’impôt dû en France si le défunt avait un patrimoine important en Espagne au jour de son décès.
Exemples pratiques
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Défunt domicilié en Espagne, avec des biens en France :
- Si un résident espagnol décède en laissant une maison en Espagne et un une maison en France. L’Espagne imposera la maison, tandis que la maison française sera imposable en France.
- Le taux d’imposition en France sera calculé uniquement en prenant en compte la maison française car le défunt était domicilié en Espagne.
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Défunt domicilié en France avec des biens en Espagne :
- Si un résident français possédait un appartement en Espagne et une maison en France au jour de son décès. L’Espagne imposera l’appartement, tandis que la maison française sera imposable en France.
- Le taux d’imposition en France sera calculé en prenant en compte la maison française mais également l’appartement espagnol car le défunt était domicilié en France au jour de son décès.
Les spécificités régionales de la fiscalité espagnole
L’une des complexités supplémentaires pour les successions en Espagne réside dans les différences fiscales entre les communautés autonomes. Par exemple :
- Madrid : la région offre des réductions importantes pour les successions en ligne directe, avec des abattements allant jusqu’à 99 % pour les conjoints et les enfants.
- Catalogne : des abattements plus faibles et des taux d’imposition potentiellement plus élevés sont appliqués, avec des réductions spécifiques pour les entreprises familiales.
- Andalousie : cette région a introduit des réductions significatives pour les résidents locaux, notamment pour les successions en ligne directe.
Les héritiers doivent donc être conscients de ces différences et, si nécessaire, obtenir des conseils spécialisés pour améliorer leur situation fiscale.
Conséquences fiscales pour les héritiers
Pour les héritiers résidents en France, recevoir une succession comprenant des biens en Espagne peut être lourdement taxé. Cependant, grâce à la convention fiscale franco-espagnole, ils peuvent éviter une double imposition complète par le biais du mécanisme d’exonération. Les héritiers doivent également être conscients des différences d’évaluation des biens entre les deux pays : en France, les biens sont évalués à leur valeur vénale au jour du décès, tandis qu’en Espagne, certains biens peuvent bénéficier de réductions spécifiques selon leur usage.
Conclusion
La fiscalité des successions impliquant la France et l’Espagne est complexe en raison des différences législatives et des spécificités régionales espagnoles. La convention bilatérale entre les deux pays joue un rôle essentiel pour éviter la double imposition et protéger les héritiers contre une taxation excessive.
Il est donc crucial pour les héritiers de bien comprendre les implications fiscales des biens situés en Espagne, notamment en ce qui concerne les biens immobiliers et mobiliers, et de s’assurer que toutes les déclarations sont faites correctement dans les deux pays. Une planification successorale adéquate, impliquant les conseils de votre notaire est ainsi vivement recommandée pour minimiser les coûts et s’assurer de la conformité aux obligations fiscales dans les deux juridictions. Pour plus d’informations : Audit juridique et fiscal – Stratégie(s) patrimoniale(s) internationales.
Déclaration de la succession espagnole : votre notaire vous accompagne
Procédure
Si vous êtes héritier d’une personne décédée ayant eu sa résidence en Espagne, notre office notarial, ainsi que ses notaires et collaborateurs, peut vous assister pour :
- Vérifier si des droits de succession sont effectivement dus en France ;
- Calculer les éventuels droits de succession dus en France ;
- Rédiger la déclaration de succession ;
- Déposer la déclaration de succession auprès de l’administration fiscale française ;
- Régler les éventuels droits de succession au Trésor Public.
Dans le cas où le défunt laisse plusieurs héritiers, il est possible de déposer une déclaration unique pour tous, ou bien de n’en soumettre qu’une pour certains héritiers (notamment en présence de différends entre héritiers).
Votre notaire peut effectuer l’ensemble des démarches fiscales à distance, sans que les héritiers n’aient besoin de se rendre physiquement à l’office. Pour en savoir plus : Acte notarié à distance, est-ce possible ?
Délai
Les héritiers en France doivent respecter les obligations déclaratives en matière de succession. Si le défunt est décédé en Espagne, la déclaration doit être faite dans un délai d’UN (1) AN à compter du décès. Passé ce délai, des intérêts de retard et des pénalités peuvent être appliqués par l’administration fiscale française.
Si des difficultés matérielles se présentent pour obtenir des documents relatifs aux biens situés en Espagne, il est possible de demander un report de délai auprès de l’administration française.
Frais
Les frais liés à l’intervention du notaire pour déclarer les droits de succession auprès de l’administration fiscale française sont strictement encadrés par la loi. Ces frais sont proportionnels à la valeur des biens hérités, selon un barème progressif.
Nous vous invitons à nous contacter avant toute démarche pour obtenir un devis personnalisé. Pour plus d’informations : Établissement d’un devis – « Frais de notaire ».
Pour toute demande d’information supplémentaire, n’hésitez pas à nous joindre par courriel (ccn@ccn.notaires.fr), par téléphone (01.88.32.98.80), ou via le formulaire de contact ci-dessous.